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CHAPITRE 3
LE COMPORTEMENT DES ACIERS INOX A LA CORROSION ET A L’USURE

La corrosion [100] est une interaction physico-chimique entre un métal et son milieu environnant entraînant des modifications dans les propriétés du métal et souvent une dégradation fonctionnelle du métal lui-même, de son environnement ou du système technique constitué par les deux facteurs.

NOTE - Cette interaction est généralement de nature électrochimique.

On voit donc que le litige est de savoir si la corrosion est le processus lui-même, ou le résultat, ou l’ensemble. C’est la première notion qui a été retenue: la corrosion est le processus lui-même, son résultat étant une attaque, un dégât dû à la corrosion.

La corrosion est donc un processus de dégradation des métaux qui, à l'exception des métaux précieux tels que l'or, ont toujours tendance à s'altérer au contact de l'atmosphère, des eaux et des divers milieux corrosifs. On estime, que chaque année, le quart de la production d'acier est détruite par la corrosion. Cette corrosion qui apparaît soit en milieu sec, soit en milieu humide, a de tels effets que l'utilisation des aciers inoxydables constitue la solution idéale pour la prévenir.

La norme ISO 8044 regroupe l’ensemble des définitions concernant les mécanismes de corrosion, notamment en fonction des milieux considérés : corrosion gazeuse, corrosion atmosphérique, etc.

On utilise l'acier inoxydable pour solutionner tous les problèmes de corrosion dans les milieux ambiants corrosifs (chimie, nucléaire, chantiers navals, plaisance, bâtiment, traitement des eaux, agro-alimentaire, mobilier urbain, électronique). En effet, l'acier inoxydable est résistant à la corrosion en milieux aqueux en présence de nombreux agents agressifs, organiques et minéraux. De plus, cet acier résiste à la corrosion à haute température en milieux gazeux et visqueux. Cette résistance à la corrosion est due à la présence de chrome (au moins 12%). Cet élément forme à la surface de l'alliage un composé oxydé qui a la propriété d'arrêter ou de ralentir la corrosion (couche passive). La stabilité de la couche passive est le facteur déterminant de la résistance à la corrosion des aciers inoxydables. Elle dépend de la nature des éléments d'alliage qui constituent l'acier, de l'état de surface, du traitement de passivation préalable.

LA RESISTANCE A LA CORROSION DES ACIERS INOXYDABLES

L’aciers inoxydables se sont pas infaillibles vis-à-vis de la corrosion. Les types de corrosion des aciers inoxydables alimentaires sont (tableau 3.1):

  1. La corrosion généralisée;
  2. La corrosion localisée.

Du fait de la résistance intrinsèque de l'acier inoxydable, la corrosion généralisée, c'est-à-dire l'attaque de toute la surface, est un incident rare dans l'agroalimentaire; elle se produit uniquement dans le cas de milieux très acides. Le seul remède est alors de changer de nuance d'acier au stade de la conception de l'équipement ou de considérer l'acier inoxydable comme un matériau consommable.

Par opposition à la corrosion uniforme, la corrosion localisée (plus spécifique pour les aciers inoxydables), intervient sur des sites discrets de la surface d'un métal exposé à un environnement corrosif.

NOTE - La corrosion localisée peut, par exemple, apparaître sous forme de piqûres, fissures, sillons, etc.

On a souvent dit que la corrosion localisée était une «maladie de l'état passif».

D'une façon plus générale, on peut dire qu'une corrosion localisée intervient chaque fois qu'il existe, dans le système de corrosion considéré, une hétérogénéité:

  • soit du métal,
  • soit du milieu,
  • soit des conditions physico-chimiques existant à l'interface.

La première approche de la corrosion étant généralement visuelle, on distingue traditionnellement les corrosions localisées, soit par la forme de l'attaque qui en résulte (corrosion par piqûres), soit par la localisation (par ex. corrosion intergranulaire). Dans d'autres cas cependant, la désignation est associée à un mécanisme (corrosion par effet de crevasse, corrosion sous contrainte, corrosion-érosion).

LES FORMES DE CORROSION LOCALISEE SPECIFIQUE AUX ACIERS INOXYDABLES ALIMENTAIRES

LA CORROSION PAR PIQURES

La corrosion par piqûres est fréquente et pernicieuse. Elle est surtout le fait des halogènures: chlorures, fluorures, etc. C'est un risque important en agroalimentaire, car les chlorures sont souvent présents dans le procédé (saumures) ou dans les produits de nettoyage ou de désinfection (eau de Javel) [2].

La corrosion par piqûres est dommageable, car les cavités créées facilitent l'accrochage des salissures. La corrosion par piqûres (pitting) est une forme de corrosion localisée au cours de laquelle le métal se dissout très rapidement en certains sites discrets de la surface, le reste de cette surface n'étant sensiblement pas attaqué. Cela se traduit souvent par la formation de trous de faibles dimensions mais de profondeur importante. La conséquence d'une telle attaque peut être la destruction rapide et inattendue des structures sur lesquelles elle se manifeste. La corrosion par piqûres est d'autant plus insidieuse qu'elle se produit sur des matériaux passivables, présentant donc une excellente résistance à la corrosion généralisée.

La plupart des matériaux sont sensibles à la corrosion par piqûres mais la présence d'espèces agressives spécifiques est nécessaire. Ce sont le plus souvent les ions halogénures dont l'agressivité se manifeste vis-à-vis de la grande majorité des matériaux. Parmi ceux-ci, les chlorures revêtent une importance particulière en raison d'une part, de leur grande distribution dans la nature et, d'autre part, de leur agressivité généralement plus élevée que celles des bromures et des iodures bien que le contraire ait été parfois observé comme, par exemple, pour les aciers inoxydables au molybdène [3]. D'autres espèces soufrées (H2S pour les aciers inoxydables) peuvent toutefois provoquer l'apparition de piqûres [9].

Remarquons que les ions nitrates sont réputés pour leurs propriétés inhibitrices de la corrosion par piqûres de nombreux matériaux : fer et aciers au carbone [11], aciers inoxydables [12], nickel [11], zirconium [13] et aussi aluminium [41].

La présence d'anions agressifs n'est pas une condition suffisante pour que la corrosion par piqûres se manifeste. En effet, pour tous les métaux, il existe une concentration limite en ions agressifs en dessous de laquelle la corrosion par piqûres ne se développe pas. La valeur de cette concentration limite est fonction de la composition de l'électrolyte.

LA CORROSION CAVERNEUSE

La corrosion caverneuse est un phénomène de corrosion localisée qui se développe dans des interstices, des zones de recoin où un matériau métallique se trouve localement en contact avec un milieu corrosif confiné, alors que la majorité de la surface du matériau est au contact de la masse du liquide.
En pratique la présence de zones confinées provient de différentes origines
la conception des appareillages (figure 3.1)
  • la formation de dépôts, soit en service, soit même pendant la fabrication
    • dépôts minéraux ou organiques dans des zones de relative stagnation
    • produits de corrosion
    • développements biologiques.

De façon très générale, la corrosion caverneuse est due à une modification locale du milieu, ce qui, entraîne un changement des conditions électrochimiques dans la caverne [1-6]. Il s'ensuit l'apparition de piles de concentration et d'un couplage galvanique entre l'intérieur et l'extérieur de la caverne (figure 3.2.). En conséquence, les vitesses de corrosion deviennent différentes et des migrations électrolytiques se produisent entre l’intérieur et l’extérieur de la caverne. Cet ensemble de processus est très souvent auto-accéléré par les différences de conditions électrochimiques entre l’intérieur et l’extérieur de la caverne.

Le plus souvent, les conditions électrochimiques deviennent plus sévères dans la caverne et la corrosion y devient plus rapide. C'est le cas des phénomènes de caverne sur les matériaux passifs.

Les caractéristiques d'une caverne à l'origine de l'évolution locale du milieu sont résumées dans la figure 3.3.

Mécanisme de l'évolution de la solution dans une caverne en milieu chloruré aéré.

Stade 1
  • Epuisement local de l'oxydant insuffisamment renouvelé, par la diffusion de l'extérieur vers l'intérieur de la caverne. Ceci vaut pour des oxydants tels que l'oxygène de l'air, l'acide nitrique, les chromates, ... En soi, cette disparition locale de l'oxydant ne suffit pas à causer de corrosion localisée mais elle constitue l'étape initiale nécessaire à l'évolution du milieu par suppression locale de la réaction cathodique.
  • Au passage, on doit remarquer qu'en milieux chlorurés non oxydants, la réaction cathodique est la réduction de l'eau et qu'elle reste toujours possible dans la caverne. Ainsi, il ne peut y avoir de moteur initial à la corrosion caverneuse, car la cause première de l'acidification n'existe pas.
Stade 2: acidification et concentration en chlorures (figures 3.2b et 3.2c)
  • Après épuisement en oxydant, l'ensemble des processus anodiques se poursuit dans la caverne et conduit à la formation de cations métalliques et d'ions H+.
  • La réaction cathodique nécessaire pour consommer les électrons libérés par les processus anodiques ne peut se produire que sur les surfaces extérieures à la caverne. Elle ne peut donc neutraliser localement les ions H+ produits par les processus anodiques.
  • La neutralité électrique des solutions est maintenue par l'établissement d'une migration électrolytique: cations de l'intérieur vers l'extérieur de la caverne, ce qui évacue une partie des cations métalliques et des ions H+ produits par les processus anodiques, et anions de l'extérieur vers l'intérieur de la caverne, ce qui y introduit un surplus de chlorures.
  • La migration électrolytique des ions à travers une solution dont la résistance est non négligeable, notamment du fait de la géométrie des cavernes, conduit à l'apparition de gradients de potentiel électrochimique non seulement entre l'intérieur et l'extérieur de la caverne mais aussi à l'intérieur de la caverne.

En résumé, le milieu dans la caverne se concentre progressivement en cations métalliques plus ou moins hydrolysés, en chlorures, et en ions H+ et devient donc de plus en plus acide. Corrélativement,. les flux migratoires augmentent entre l'extérieur et l'intérieur de la caverne et la différence de potentiel augmente également. Il faut aussi noter que le pH augmente légèrement autour de la caverne, sur l'ensemble de la zone sur laquelle est distribué, l'excès de réaction cathodique. L'étendue de cette zone dépend de la résistivité du milieu chloruré, et de la cinétique des réactions dans la caverne. Quand la caverne est le siège d'une corrosion active, cette zone cathodique est souvent le siège d'une précipitation d'hydroxydes, ce qui crée une sorte d'auréole autour des cavernes (ou des piqûres) actives.

Moyens de prévention et de lutte contre la corrosion caverneuse.
Ils interviennent à différents stades:
  • conception des appareillages: il s'agit d'abord de minimiser les zones de caverne existant lors de la mise en service et ceci relève de la conception des ensembles: on peut par exemple éviter des soudures avec recouvrement, remplacer des brides à joints par des assemblages soudés, sertir (dudgeonner) les tubes dans les plaques tubulaires d'échangeurs, polir des portées de joints et, de façon générale, éviter les interstices de toute nature. Mais il faut parfois aussi penser à minimiser les risques de formation de caverne au cours du fonctionnement de l'appareillage ; par exemple des conditions hydrodynamiques bien étudiées peuvent éviter la formation de dépôts.
  • mise en oeuvre des matériaux: une mise en oeuvre soignée permet d'éviter de dégrader localement les propriétés des matériaux utilisés: une attention particulière doit donc être portée aux procédures de soudage, aux éventuels traitements thermiques et à l'état de surface (micro-géométrie, pollutions, composition superficielle). Une mise en propreté finale par décapage et passivation ne peut qu'être bénéfique dans le cas des aciers inoxydables.
  • conduite des installations: des procédures appropriées, notamment en périodes transitoires ou même pendant les périodes d'arrêt, peuvent être d'une grande importance pour conserver l'intégrité de certaines installations. Par exemple, on a déjà mentionné précédemment le cas des précautions à prendre sur des installations de dessalement de l'eau de mer pour éviter les entrées d'air pendant les périodes d'arrêt. Le maintien de la propreté des installations et l'élimination périodique de dépôts en formation peuvent aussi constituer une action efficace contre la corrosion caverneuse.
  • choix des matériaux: le choix de matériaux résistant à la corrosion caverneuse est évidemment nécessaire, mais le coût d'une installation peut augmenter considérablement si des aciers inoxydables très alliés, des alliages à base nickel ou des alliages de titane sont utilisés. Or, le degré de résistance demandé au matériau peut dépendre de façon significative de la conception de l'appareillage, de la mise en oeuvre (soudage en particulier) et/ou des procédures d'exploitation. Le choix d'un matériau très résistant ne doit donc pas nécessairement être considéré comme la seule solution au problème de caverne, et il doit prendre en compte non seulement les conditions de fonctionnement nominales, mais aussi les périodes transitoires et les excursions possibles hors des conditions nominales.
  • protection électrochimique: enfin, il est également possible de protéger des installations contre la corrosion caverneuse en maintenant leur potentiel dans des zones de potentiel appropriées. Dans le cas des aciers inoxydables, il s'agit de maintenir le potentiel en deçà du potentiel de protection, au moins dans certaines zones critiques. Ceci peut être obtenu du fait de couplages avec des matériaux moins nobles présents dans l'installation, par l'utilisation d'anodes sacrificielles ou par application de courants. C'est par exemple la protection cathodique des aciers inoxydables martensitiques de type Z5 CND 17-4.

CORROSION INTERGRANULAIRE

CORROSION INTERGRANULAIRE HORS PRECIPITATION (CIGHP)

La corrosion intergranulaire hors précipitation est observée dans des solutions oxydantes: il se produit une dissolution sélective localisée à l'émergence de certain ou de tous les joints de grains sur la surface. Cette corrosion peut amener à un déchaussement des grains et à la destruction catastrophique du métal (figure 3.4).

Ces conditions de corrosion intergranulaire sont susceptibles d'être reproduites et étudiées en laboratoire. Cependant, d'autres tests chimiques et électrochimiques ont été mis au point pour étudier différents paramètres corrélant les aspects structuraux et chimiques des joints de grains et des interphases.

Facteurs de la corrosion intergranulaire (CIGHP).

Les phénomènes de corrosion localisée sont le plus souvent liés à des imperfections structurales et/ou chimiques des matériaux. Ces processus se produisent sur les défauts de la matrice cristalline

  • dislocations,
  • joints de grains,
  • interphases de type austéno-ferritique.
De ce fait, on met en cause les facteurs physico-chimiques des défauts structuraux :
  • structure atomique et composition chimique en volume,
  • ségrégation d'impuretés,
  • phase bidimensionnelle.

Il est essentiel de remarquer que la corrosion aqueuse est un processus qui ne concerne que la surface et pas les propriétés de volume. Il ne faut donc considérer que la réactivité de l'émergence des joints de grains et interphases à l'interface métal- solution.

Trois processus sont à prendre en compte:

  1. la création de la double couche chimique ou électrochimique à la surface du métal. Pratiquement dans tous les cas se forme en outre une couche barrière : film de corrosion
  2. l'amorçage ou nucléation de la corrosion intergranulaire qui est contrôlée par le film de corrosion et par la réactivité de la structure atomique. Par exemple, les sites actifs de dissolution et leur distribution sont déterminés par des facteurs métallurgiques et par l'homogénéité chimique de la surface;
  3. la croissance ou propagation qui nécessite la reproductibilité de l'étape précédente mais qui est aussi influencée par les facteurs cinétiques tels que la formation d'un film de corrosion, la diffusion des espèces réactives, la passivité et la polarisation.
Les facteurs de la corrosion intergranulaire.

Schématiquement, nous sommes en présence d'une interface matériau-milieu comportant:

  • le métal que l'on peut décrire par: sa structure cristallographique, sa composition chimique, les défauts de structure dont les joints de grains ;
  • la "surface" caractérisée par la répartition des électrons, la structure des défauts émergents (marches et coins atomiques, joints de grains...), la réactivité chimique et électrochimique, le film de corrosion et ses propriétés mécaniques, de diffusion chimique et de conduction électrique, la double couche électrochimique, les propriétés des sites de nucléation ;
  • le milieu d'attaque, sa composition, ses propriétés redox, les composantes électrochimiques : potentiel et différentiel cathodique-anodique.

Le tout peut se résumer par une énergie de l'atome à la surface du métal, une énergie de l'intermédiaire de réaction à la surface, l'énergie d'équilibre finale en solution. C'est la différence énergétique de ces trois états qui explique les différences de corrosion dans les joints de grains. La nucléation de la corrosion intergranulaire est contrôlée par la "surface". Les sites actifs de dissolution et leur distribution sont déterminés par les facteurs métallurgiques et l'homogénéité chimique et mécanique de la surface.

La croissance ou propagation de la corrosion intergranulaire nécessite la reproductibilité dans le temps de l'étape précédente. Elle est influencée par la formation d'un film de corrosion en surface et aux joints de grains qui fixe les facteurs cinétiques de dissolution (polarisation, diffusion des espèces réactives, sites de nucléation).

CORROSION INTERGRANULAIRE LIEE A LA PRECIPITATION D’UNE SECONDE PHASE

Dans de nombreux cas, la corrosion intergranulaire (figure 3.5) est plutot liée à la précipitation d’une (ou plusieurs) phase (s) aux joints de grains, carbures de chrome ou composés intermétalliques par exemple. Il résulte de cette précipitation une modification locale de la composition ainsi que l’existence de piles électrochimiques qui peuvent parfois impliquer plus de deux électrodes; ces piles sont en général très actives.

Cas des aciers inoxydables austénitiques
Un acier inoxydable austénitique à l'état sensibilisé est caractérisé par la précipitation du carbure Cr23 C6. Ce carbure, très riche en chrome, a appauvri la zone voisine en cet élément (figure 3.6). Le système comporte alors trois zones distinctes qui vont donner lieu à trois électrodes, donc à un système (Fig. 3.7):
  1. le carbure de chrome à un potentiel noble donc cathodique (domaine I)
  2. la zone déchromée dont la passivité n'est plus stable et qui adopte un potentiel anodique (domaine II)
  3. le coeur des grains de l'austénite dont la teneur en chrome n'a pas été modifiée et qui a la matrice à l'état hypertrempé (domaine III)

Il en résulte que la zone déchromée s'attaque suivant les caractéristiques du milieu environnant qui vont imposer le potentiel de travail on voit de suite qu'il peut y avoir risque de corrosion intergranulaire . Cette attaque résulte de la modification locale de composition de l'acier.

Cas des aciers inoxydables ferritiques.

La corrosion intergranulaire des aciers inoxydables, telle que nous venons de la décrire, n'est pas spécifique des nuances austénitiques, en effet d'autres nuances y sont sensibles et en particulier les aciers ferritiques. La différence entre ces deux types d'aciers vient du fait que les conditions thermiques provoquant la précipitation des secondes phases aux joints de grains ne sont pas les mêmes. La diffusion du carbone est plus rapide dans la ferrite que dans l'austénite; il en résulte qu'une trempe à l'eau après un traitement thermique d'homogénéisation à haute température (traitement de mise en solution du carbone), n'est pas suffisamment énergique pour éviter toute précipitation des carbures de chrome lors du refroidissement. Pour les nuances ferritiques, il faut, outre le carbone, prendre aussi en compte l'azote qui peut donner des nitrures, ce qui conduit au même effet. La corrosion résultant de la précipitation de nitrures s'observe surtout dans le cas des aciers à très basse teneur en carbone (< 0,010 % en poids) ou encore dans les aciers à l'azote. La précipitation, pour des raisons cinétiques, est la plus marquée entre 540 et 600°C. Toutefois un traitement thermique à 800°C suffit pour rehomogénéiser la distribution du chrome de part et d'autre du joint car le coefficient de chrome dans la ferrite est élevé. C'est pour cette raison que les nuances ferritiques sont considérées comme plus résistantes que les nuances austénitiques.

Cas des aciers austéno-ferritiques.

Ces nuances offrent une bien meilleure résistance à la corrosion intergranulaire. Ceci tient au fait que cette structure biphasée contient de la ferrite alpha plus riche en chrome et de l'austénite gamma plus riche en carbone. La précipitation de carbures, si elle intervient, a lieu aux interfaces alpha/gamma; ceci diminue donc le taux de précipitation par unité d'aire de surface aux joints de grains de l'austénite (interfaces gamma/gamma). On en déduit que la résistance à cette forme de corrosion localisée pour ce type d'aciers va dépendre du rapport des phases ferritique et austénitique; ce rapport dépend lui-même de la composition chimique des aciers et des traitements thermiques (cf. le diagramme de Schaeffler ou les diagrammes équivalents). Par ailleurs, le chrome précipité sous forme de carbures provient de la ferrite; il en résulte que l'appauvrissement de l'austénite est moins important qu'en absence de phase ferritique. De façon générale, les nuances courantes d'aciers austéno-ferritiques sont sensibilisées à la suite de traitements thermiques à des températures comprises entre 400 et 850°C; un recuit entre 950 et 1000°C permet d'éviter ce type d'attaque.

Cas des aciers martensitiques.

La température de traitement où la sensibilisation est très marquée pour ces aciers, est voisine de 500°C; toutefois, la précipitation de carbures et de nitrures intervient dès 300°C; l'acier est sensibilisé, dans les zones où le constituant martensitique est décomposé. Un traitement thermique à une température supérieure à 700°C restaure la résistance à la corrosion intergranulaire.

REMEDES POUR PREVENIR LE RISQUE DE CORROSION INTERGRANULAIRE.

La compréhension des mécanismes de corrosion intergranulaire des aciers suggère plusieurs remèdes efficaces à mettre en oeuvre pour prévenir cette forme d'attaque localisée.

  • prolonger le traitement thermique de revenu pour homogénéiser la teneur en chrome et combler la "vallée" de concentration au voisinage du joint où est précipité le carbure afin que la teneur de cet élément soit supérieure en tout point à celle du seuil de passivité stable (12% en poids). Cependant, cette solution implique des durées longues, non réalistes en pratique. De même, la dimension trop grande de certaines structures soudées ne permet pas la mise en oeuvre industrielle d'une telle solution, élégante sur le plan métallurgique.
  • réduire la teneur en carbone à une valeur suffisamment faible pour ne pas risquer une précipitation de carbures aux joints: une teneur inférieure à 0,03% en poids se révèle satisfaisante, pour des conditions usuelles; des nuances dites à bas carbone ont ainsi été développées. Cependant, compte tenu du caractère fortement -gène du carbone, il est nécessaire pour conserver la structure austénitique, d'augmenter la teneur en nickel: l'acier Z6 CN 18-09 (AISI 304) devient l'acier Z3 CN 18-10 (AISI 304 L); il contient 1 % en poids de nickel en plus pour compenser l'abaissement de 0,03% en poids de carbone (ceci illustre le caractère fortement gamma-gène du carbone par rapport à celui du nickel). De même, l'acier au molybdène Z6 CND 17- 11 (AISI 316) devient l'acier Z3 CND 17-12 (AISI 316 L);
  • ajouter des éléments dont l'affinité pour le carbone est supérieure à celle du chrome: titane, niobium, vanadium ou tantale: ils donnent naissance à des carbures de type MC. Leurs teneurs dépendent de la teneur totale CT en carbone de l'acier: on obtient alors des nuances dites stabilisées (Z6 CNT 18-1 1, Z6 CNNb 18-1 1, dérivées de l'acier Z6 CN 18-09, ou encore Z8 CNDT 17-12, Z6 CNDNb 17-12, dérivées de l'acier Z6 CND 17-11);
  • ajouter un élément alphagène comme le molybdène. Après hypertrempe, la structure obtenue comporte, au sein de la matrice austénitique, des ilôts de ferrite. Comme indiqué ci-dessus, les solubilités du carbone et du chrome étant respectivement plus grandes dans l'austénite et dans la ferrite, les carbures de chrome se forment aux interfaces austénite-ferrite. Il y a certes risque de corrosion intergranulaire, mais celle-ci ne se fait plus de façon continue le long de tous les joints de grains.

CORROSION SOUS CONTRAINTES

Ce type de corrosion, surtout présente dans la structure austénitique des aciers du même nom, est souvent initié par des piqûres. Elle se traduit par des réseaux de fissures perpendiculaires aux contraintes de traction. Ce phénomène trouve son origine dans le milieu d'utilisation et se propage en fonction des conditions de service. Pour l'éviter, la fabrication doit induire un minimum de contraintes résiduelles

EROSION - CORROSION, CAVITATION – CORROSION ET CORROSION LOCALISEE

Dans de très nombreuses installations industrielles, les matériaux sont en contact avec un fluide agressif en mouvement, ce fluide pouvant éventuellement contenir une deuxième phase solide, liquide ou gazeuse. Aux dégradations induites par la corrosion, liées à la composition du milieu, s'ajoutent des dommages mécaniques liés à la vitesse de circulation du fluide (érosion -corrosion) et aux interactions surface/particule (érosion -corrosion ou abrasion -corrosion, cavitation -corrosion). L'analyse de tels phénomènes est complexe car les processus de corrosion peuvent être considérablement modifiés lorsqu'on passe de conditions statiques à des conditions dynamiques (transport de matière) et lorsque les conditions peuvent être localement perturbées par l'impact de particules ou de bulles.

L'ensemble des phénomènes de corrosion induits par un fluide corrosif en mouvement peut se classer selon deux groupes de processus:
  • Les processus qui font intervenir le transport de matière seul,
  • Les processus qui résultant d'un couplage entre un endommagement mécanique et des processus chimiques contrôlés par le transport de matière. L'origine de la deuxième phase détermine la nature du phénomène (Fig. 3.8):
  • Existence d'une seconde phase liquide non miscible : mécanisme contrôlé par le transport de phase ;
  • Existence de bulles qui implosent à la surface: mécanisme de cavitation
  • Existence de particules solides en suspension dans l'électrolyte: mécanisme d'érosion ou d'abrasion.

Ces phénomènes d'érosion - corrosion ou d'abrasion - corrosion peuvent induire des phénomènes de corrosion localisée qui peuvent être caractérisés par la nature des cellules galvaniques induites. Trois types de cellules galvaniques (c'est-à-dire coexistence de surfaces anodiques et cathodiques) peuvent être induits par un écoulement mono ou diphasique:

  1. Cellules galvaniques macroscopiques (généralement stables dans le temps);
  2. Cellules galvaniques microscopiques (caractérisées par leur existence transitoire);
  3. Cellules galvaniques microscopiques induites par l'hétérogénéité du matériau (existence de phases plus résistantes mécaniquement).

Suite aux variations de conditions hydrodynamiques et aux endommagements mécaniques induits par le fluide (mono ou diphasique) en mouvement, des processus de corrosion peuvent intervenir dans des milieux qui, en conditions statiques, ne génèrent pas ce type de corrosion. De même, dans des milieux favorisant la corrosion localisée en conditions statiques (milieux chlorures neutres, par exemple), l'érosion ou la cavitation peuvent jouer un rôle favorable ou défavorable suivant les conditions.

CORROSION GALVANIQUE

La corrosion galvanique se définit simplement par l'effet de corrosion résultant du contact de deux métaux ou alliages différents, immergés dans un environnement corrosif conducteur. On utilise aussi le terme de bimétallisme.

Lorsqu'un métal est immergé dans une solution électrolytique quelconque, on peut mesurer son potentiel libre de dissolution (potentiel d'abandon ou de corrosion naturelle) à l'aide d'une électrode de référence et d'un millivoltmètre à haute d'entrée. Dans chaque solution, il est alors possible d'établir la série galvanique, c'est-à-dire un classement des différents métaux et alliages selon le potentiel expérimental mesuré. La figure 3.9 illustre, à titre d'exemple, les séries relevées en solution de salive et en eau de mer. Lors d'un couplage (contact ou liaison électrique externe entre deux alliages différents, il s'établit un courant électronique entre eux, résultant de leur différence de potentiel. On a, généralement, accroissement de la corrosion de l'alliage le moins noble (anodique) et diminution, voire suppression, de la corrosion de l'alliage le plus noble (cathodique).

CORROSION SELECTIVE

Comme son nom indique, ce mode de corrosion se définit comme la dissolution préférentielle de l’un des éléments constituant l’alliage s’il est homogène, ou l’une des phases de cet alliage s’il est hétérogène.

L'attaque sélective due aux effets galvaniques entre la phase ferritique et la phase austénitique des aciers inoxydables duplex a été étudiée par plusieurs auteurs [28]. Il apparaît que:

  • dans les milieux fortement agressifs ou ceux conduisant à une acidification locale par hydrolyse des sels métalliques (sous dépôt ou dans une zone stagnante), la phase la moins noble est la ferrite. Dans ce cas, le matériau se trouve alors déplacé dans son domaine actif et l'effet galvanique entre les deux phases α et γ prend de l'importance.
  • à l'état passif, les risques de corrosion sélective sont très limités, voire inexistants.
  • dans la pratique industrielle, ce type de détérioration se rencontre parfois associé à d'autres modes (piqûre, corrosion sous contrainte). Selon les conditions locales, les deux phases α ou γ peuvent être l'objet de l'attaque sélective, compte tenu de la différence de composition, en particulier en chrome, nickel et molybdène de ces deux phases.

Dans une étude assez complète sur des aciers duplex Fe-Cr-10 % Ni, Yau et Streicher [29] ont montré que, dans les acides réducteurs, la ferrite constitue toujours la phase la moins noble. Sa vitesse de corrosion augmente avec l'augmentation de la teneur en chrome et la diminution de la teneur en nickel. La corrosion est aggravée par le couplage défavorable avec la phase austénitique cathodique. Cette aggravation dépend naturellement de la répartition des surfaces relatives α/γ en contact avec le milieu et cet effet de rapport de surface est d'ailleurs plus important que le gradient de composition entre les deux phases.

Dans la figure 3.10 ont présenté schématique les formes de corrosion présentée au-dessus.

POUR LA RESISTANCE A LA CORROSION

  • il faut connaître la composition complète et précise des solutions qui seront en contact avec le matériau (produit nettoyage, par exemple);
  • il faut connaître la température de ces différentes solutions
  • il faut aussi connaître les autres matériaux qui pourront être en contact avec le produit et les méthodes de fabrication de l'ensemble si la pièce ne représente qu'une partie d'un ensemble.

La résistance du matériau : on devra regarder quel poids devra supporter la pièce pour choisir la résistance de l'acier entre les trois classes de propriétés.

Pour choisir notre acier, il faut regarder sa composition chimique et ceci à l'aide d'une figure comme ci-dessous (figure 3.11): Figure 3.11. Influence de la composition chimique sur la résistance à la corrosion :

En résumé, on regardera la composition chimique de l'acier, la propriété et le domaine d'application.

LES EXIGENCES DE LA SURFACE

La conception hygiénique des matériels destinés à l'agroalimentaire se fonde sur des règles de tenue à la corrosion et de nettoyabilité, avec la contrainte supplémentaire qu'est l'alimentarité des matériaux et des traitements de finition.

Face à la diversité des machines qu'elle utilise, (remplisseurs, mélangeurs, autoclaves, échangeurs, hachoirs, broyeuses, pompes, fours, façonneuses, conditionneurs ... ) l'industrie agroalimentaire met en œuvre la plupart des matériaux de base. L'acier inoxydable entre dans l'ensemble des secteurs alimentaires et à tout stade de transformation des aliments.

Ces matériaux ne répondent pas toujours à l'ensemble des sollicitations auxquelles ils sont soumis. Ils peuvent subir généralement différents traitements de surface. Dans les zones alimentaires, il n'est pas rare d'appliquer un revêtement sur un substrat relativement noble tel que l'acier inoxydable afin de garantir les propriétés anticorrosion du matériel dans son ensemble. Quel que soit le but du traitement (usure, fatigue superficielle ... ) la surface doit de toute façon résister à la corrosion, être exempte d'oxydes et son état doit être contrôlé afin d'éviter les sites d'accrochage des souillures. Il faut également s'assurer de l'adhérence des revêtements dont la porosité doit être nulle et la fissuration, limitée.

Deux zones aux exigences différentes

Une construction pour l'agroalimentaire est d'après la directive « Machines » constituée de deux zones, l'une en contact avec les denrées alimentaires et l'autre où ce contact n'existe pas. La zone alimentaire comprend toute surface des machines, appareils ou équipements avec laquelle les denrées alimentaires viennent en contact dans les conditions normales d'utilisation ou accidentellement si elles peuvent sans intervention retourner dans la masse des produits traités.

Au niveau européen, au-delà de la directive «Machines», des exigences sur les surfaces peuvent être précisées dans des normes générales de conception hygiénique ou dans des normes spécifiques à un type d'équipement (trancheurs, façonneuses, coupe - légumes, batteurs - mélangeurs). Bien souvent des publications d'organismes font références et servent de base aux travaux normatifs: EHEDG (européen), Campden (anglais), FIL (industrie laitière), 3A (américain).

En fonction des zones considérées, les contraintes en corrosion et traitement de surface sont différentes. Dans la zone alimentaire, les surfaces des matériaux et revêtements doivent être résistantes à la corrosion vis-à-vis des aliments et des produits de nettoyage, non absorbantes, durables, nettoyables, si nécessaire désinfectables, sans cassure, résistantes aux craquelures, au fissurage, à l'écaillage, à l'abrasion. Avec souvent un état de surface minimal. Tout cela vise à maintenir une surface ne pouvant pas emprisonner irréversiblement des souillures ni être le siège d'une prolifération bactérienne non éliminable par des conditions usuelles de nettoyage. La zone non alimentaire doit être conçue pour empêcher la rétention d'humidité et faciliter le nettoyage. Les critères de conception peuvent être moins contraignants (rugosité, matériaux …).

Deux milieux agressifs

Les matériaux sont soumis à deux principaux types de milieux agressifs: le milieu alimentaire et le milieu de nettoyage.

Le milieu alimentaire peut être de toute nature (lait vin, vinaigre, moutarde, jus de fruit, saumure ... ). La tenue à la corrosion est relativement bien maîtrisée dans la mesure où l'on connaît les matériaux appropriés à chaque secteur alimentaire. Les données bibliographiques (tables de corrosion ... ) donnent pour la plupart des matériaux usuels des renseignements sur leur comportement dans les milieux alimentaires. Des essais de laboratoires dans des milieux simulateurs (acide lactique, acide citrique, chlorure de sodium) sont susceptibles de renseigner sur le comportement à la corrosion des matériaux non référencés. L'opération de nettoyage est en général considérée comme faisant partie du procédé alimentaire. Dans certains secteurs, les surfaces peuvent être soumises à des contrôles biologiques de propreté de surface. Qu'il s'agisse de circuits ouverts (nettoyage manuel avec ou sans pression) ou de circuits fermés (nettoyage en place en circulation), le cycle de nettoyage fait appel à des produits chimiques potentiellement agressifs pour les matériaux. Les produits utilisés diffèrent selon les souillures à éliminer, leur quantité et leur état de transformation (cuites, séchées ... ). Des séquestrants, tels que l'EDTA (éthylènediaminetétra-acétique) ou l'acide citrique, qui présentent un caractère complexant sont généralement ajoutés dans les solutions de nettoyage pour éviter la redéposition des souillures. Des inhibiteurs de corrosion peuvent également être introduits notamment pour le nettoyage de certains métaux, comme l'aluminium, sensible à la présence d'un milieu alcalin ou comme l'acier inoxydable en présence de chlorures

La géométrie de la pièce est conçue en fonction des impératives appliques pour la tenue mécanique de l’ensemble lui-même et doit minimiser les risques de corrosion. Une mauvaise conception peut provoquer une corrosion prématurée d’un matériau théoriquement résistant dans un milieu donné. Les situations à éviter absolument ont donné en figures 3.11-3.35.

L’USURE DES ACIERS INOXYDABLES

De plus en plus se développe l'emploi des aciers inoxydables pour la réalisation de pièces mécaniques frottantes; c'est en particulier le cas dans les domaines alimentaire, nucléaire, spatial; ces aciers sont aussi couramment utilisés dans les mécanismes devant fonctionner dans l'eau et plus encore dans l'eau de mer; de même, s'amplifie l'utilisation des réfractaires austénitiques dans les applications à hautes températures, etc.

En ce qui concerne le frottement, ces aciers nécessitent, en raison de leur très grande aptitude au grippage, des précautions d'emploi très particulières.

Les principaux incidents que l'on peut rencontrer sur des pièces frottantes en acier inoxydable, sont:

1. LE GRIPPAGE.

On voit sur la figure 3.36 ce qui peut se passer lorsqu'on fait frotter deux pièces en acier inoxydable (dans le cas présent, il s'agit d'un acier inoxydable austénitique ayant frotté sur un inoxydable martensitique): il y a eu grippage. Dans ce cas, il s'agit d'un grippage par soudure. Interprétation: sous l'effet combiné des hautes températures engendrées micro-localement par le frottement et de la déformation plastique des aspérités, les surfaces des corps frottants sont placées dans des conditions telles que tous les phénomènes prévus en théorie par la thermodynamique, la physique ou la chimie ont des chances d'apparaître (diffusion, formation d'alliages, fusion suivie de trempe, etc.); il en résulte entre les surfaces des corps frottants la formation d'un nouveau matériau d'interface fabriqué à partir des métaux et des ambiances en présence; si ce matériau a des caractéristiques mécaniques supérieures à celles de l'un et de l'autre des deux métaux en présence, le mouvement, pour se poursuivre, doit déchirer le plus faible de ces deux métaux ; il y a donc transport sur une des deux pièces du métal de l'autre (dans le cas de la figure 3.36 transport de l'acier inoxydable austénitique sur l'inoxydable martensitique).

Il est d'autres cas où l'explication du phénomène est un peu moins aisée. Par exemple, on utilise très souvent le cupro-aluminium comme antagoniste de l'acier inoxydable. Dans nombre de cas et en particulier ceux où la lubrification est aléatoire, un tel couple de frottement peut conduire au grippage. On peut donner au phénomène l'explication suivante: pendant les premiers moments du frottement, le cupro-aluminium subit des transformations physico-chimiques superficielles qui se caractérisent visuellement par l'apparition d'une coloration rouge à sa surface, l'analyse de ce composé de couleur rouge révèle qu'il s'agit de cuivre pratiquement pur, or, le cuivre grippe quasi instantanément sur l'acier inoxydable avec transport de cuivre sur l'acier inoxydable. Autrement dit, c'est parce qu'en cours de frottement, le cupro-aluminium se recouvre de cuivre qu'il devient apte à gripper sur l'acier inoxydable.

Bien entendu, les phénomènes précédents peuvent être considérablement perturbés par l'ambiance dans laquelle baignent les mécanismes, en particulier par les transformations physico-chimiques des matériaux telles les oxydations.

En définitive, une des premières conditions à respecter pour faire frotter un métal X sur l'acier inoxydable est de choisir ce métal de façon telle qu'il soit insoluble à la fois dans l'acier inoxydable et dans les oxydes dont ce dernier peut se recouvrir. En pratique, le choix de tels couples est difficile à faire a priori.

2. LES DECHIRURES SUPERFICIELLES PAR SURTENSION.

On peut démontrer que lorsqu'un curseur frotte sur une piste, celle-ci est le siège à l'arrière du curseur de contraintes de tension dont la valeur peut atteindre 2 f ∙ pm, où f est le coefficient de frottement et pm la pression maximale au centre de 'empreinte d'appui.

On conçoit donc que si le matériau constituant la piste a une résistance à la rupture inférieure à cette valeur 2 f . pm, il s'ensuivra des déchirures de la peau de la piste.

L'acier inoxydable est très sensible à ce phénomène, qui est illustré par les figures 3.37 et 3.38 qui représentent, vues par en dessus, les surfaces de deux pièces en acier austénitique dont l'une a été mise dans des conditions de frottement telles que les contraintes de tension 2 f . pm soient supérieures à la résistance à la rupture de l'acier et l'autre dans les conditions inverses.

L'observation en coupe de telles fissures montre qu'elles n'intéressent (fig. 3.39) qu'une très faible profondeur en dessous de la surface, de l'ordre de quelques microns; par contre, elles peuvent être à l'origine d'une émission de particules avec pour aboutissement le blocage du mouvement, c'est-à-dire ce que l'on appelle communément le grippage.

3. LE FLUAGE.

Ce phénomène est particulièrement fréquent dans les cas de frottement sous hautes charges ; en particulier, l'acier inoxydable austénitique y est très sensible (figure 3.40). Deux cas sont possibles :

  • ou bien le phénomène de fluage ne se stabilise pas et dans ce cas la géométrie des pièces peut être totalement perturbée;
  • ou bien le phénomène de fluage se stabilise et dans ce cas l'écrouissage superficiel qui en résulte peut être très bénéfique du point de vue frottement ; par contre, il peut y avoir des risques du point de vue de la résistance des pièces à la corrosion.

PRINCIPALES CONDITIONS A RESPECTER POUR FAIRE FROTTER UN ACIER INOXYDABLE

A partir des observations précédentes, on peut énoncer ainsi les principales conditions à respecter pour qu'un acier inoxydable frotte dans des conditions acceptables:

  • il faut d'abord intercaler entre les deux pièces frottantes un inhibiteur de soudure. Dans le cas des aciers classiques, il existe beaucoup de ces inhibiteurs (couches d'oxydes, films lubrifiants adsorbés, sulfure de fer, etc.) ; par contre, dans le cas de l'acier inoxydable, le problème est rendu plus complexe, car il ne faut pas sensibiliser le matériau à la corrosion;
  • il faut ensuite réaliser à la surface de l'acier inoxydable une couche qui soit à la fois dure, ductile et homogène: dure pour pouvoir résister au labourage par les aspérités de la pièce antagoniste, ductile pour pouvoir suivre sans se briser d'éventuelles déformations du substrat, homogène pour limiter au maximum l'effet des contraintes de traction à l'arrière du curseur.

Or, un traitement de surface remplit ces conditions

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